Covid-19 : Loyers commerciaux et professionnels
Une ordonnance (n°2020-316) du 25 mars 2020, publiée au JO du 26 mars 2020 nous éclaire sur les mesures prises en faveur de certaines entreprises qui assument des loyers commerciaux et professionnels. Si le rapport au Président de la République pour prendre cette ordonnance présente la mesure comme permettant un report intégral ou l'étalement du paiement des loyers et des charges locatives, en pratique l'ordonnance n'impose aucun report ou étalement, mais lève toute sanction en cas d'impayés. Cette ordonnance prévoit aussi la possibilité, pour ces mêmes entreprises, de demander l'échelonnement du paiement de leurs factures, sans aucune pénalités, d'eau et d'énergie.
Quelles sont les entreprises bénéficiaires de la mesure ?
Ne pourront en bénéficier que les entreprises éligibles au fonds de solidarité, par ailleurs créé par une autre ordonnance (n°2020-317 du 25.03.2020).
Ce fonds, créé pour une durée de trois mois, pourra être prolongé pour une nouvelle durée de trois mois. Il a pour objet le versement d'une aide financière aux personnes physiques et morales de droit privé exerçant une activité économique particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation du covid-19 et des mesures prises pour en limiter la propagation.
Un décret (non publié ce jour), fixera les conditions relatives aux entreprises éligibles, les conditions d'attribution de ces aides et leur montant.
À noter : A priori, ce dispositif ne bénéficiera qu'aux TPE, micro-entrepreneurs et indépendants qui emploient moins de 10 salariés, font moins d'un million d'euros de chiffre d'affaires, et qui ont subi une fermeture administrative ou ont connu une perte de chiffre d'affaires de plus de 70% au mois de mars 2020, par rapport à mars 2019 → à la parution du décret nous préciserons ces critères.
Quels sont les locaux concernés :
Sont exclusivement concernés les locaux commerciaux et les locaux professionnels. S'il en est besoin, précisons que les locaux à usage d'habitation sont donc exclus.
Le local commercial s'entend de celui où est exploité un fonds de commerce. Le local professionnel s'entend de celui affecté à l'exercice d'une profession libérale, non commerciale, non artisanale, non industrielle.
Quelle est la période des loyers et des charges locatives concernés par la mesure ?
Sont concernés les loyers et les charges locatives dont l'échéance de paiement intervient entre le 12 mars 2020 et 24 juillet 2020, que nous désignerons période « tampon ».
A noter : L'article 4 (2ème alinéa) de l'ordonnance précise qu'il s'agit de la période comprise entre le 12 mars 2020 et l'expiration d'un délai de deux mois après la date cessation de l'état d'urgence sanitaire déclaré par l'article 4 de la loi du 23 mars 2020 (n°2020-290). À date, cette loi déclare l'état d'urgence sanitaire pour une durée de deux mois à compter de son entrée en vigueur. En principe l'état d'urgence sanitaire expirera donc au 24 mai 2020.
Que prévoit l'ordonnance pendant la période « tampon » ?
L'ordonnance ne prévoit, ni un effacement des loyers et des charges locatives dues pendant cette période du 12.03.2020 au 24.07.2020, ni un report ou un étalement de paiement qui s'imposerait.
Conseil : les loyers et les charges dus aux échéances concernées doivent continuer d'être appelés auprès des locataires concernés.
L'ordonnance prévoit que le défaut de paiement des loyers et des charges locatives dont l'échéance de paiement intervient pendant la période « tampon », interdit l'application :
- des pénalités financières ou des intérêts de retard ;
- des dommages et intérêts et des astreintes ;
- de l'exécution de la clause résolutoire ;
- de toute clause pénale ou prévoyant une déchéance ;
- de l'activation des garanties en paiement ou des cautions.
Ainsi, face à un retard ou un impayé constaté pendant la période « tampon », si le bailleur tente de recouvrer les échéances dues par tout moyen, il ne pourra pas demander l'exécution de la clause résolutoire, les impayés ne produiront pas d'intérêts, il ne pourra pas demander de dommages et intérêts pour réparer le préjudice subit, et ne pourra pas plus activer les garanties ou les cautions apportées par le locataire lors de la signature du bail.
Que peut faire le bailleur à l'issue de la période tampon ?
A défaut de plan d'apurement négocié amiablement avec le locataire, à l'issue de la période « tampon » (à date fixée au 24 juillet 2020), le bailleur ne pourra qu'introduire une action judiciaire en paiement des loyers et des charges restant dus et qui étaient exigibles pendant la période tampon. Toutefois, à l'occasion de cette action judiciaire en recouvrement, le bailleur ne pourra demander aucune indemnité ou autre sanction pécuniaire, ni même actionner une garantie ou une caution.
A suivre : la mise à jour avec le décret fixant les entreprises éligibles.